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Recherche scientifique, réchauffement climatique, transition énergétique. Sébastien Balibar CNRS, Ecole Normale Supérieure, Académie des Sciences. Belchatow (Pologne) 5000 MW lignite premier émetteur de CO2 en Europe. ANCRE, 29 avril 2014.
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Recherche scientifique, réchauffement climatique, transition énergétique Sébastien Balibar CNRS, Ecole Normale Supérieure, Académie des Sciences Belchatow (Pologne) 5000 MW lignite premier émetteur de CO2 en Europe ANCRE, 29 avril 2014
Le réchauffement planétaire est important inhomogène et fluctuant: estimation du GIEC (2000 chercheurs, 30 pays) selon les politiques énergétiques choisies:+ 0.6° en 1986-2005 par rapport à 1850-1900 + 2 à 5° en 2081-2100 par rapport à 1986-2005 Arctique: de septembre 1999 à septembre 2012
conséquences du réchauffement • élévation du niveau des mers (dilatation en surface, fonte des glaces continentales => + 30 cm à 1 m en 2100) • déplacements de populations entières (îles, grands deltas fluviaux) • fonte probable des banquises l'été en 2020-2030 • modification des courants marins (Gulf Stream) • acidification des océans (augmentation du CO2 dissout), bouleversement de la faune • multiplication des évènements extrêmes: sècheresse, déluges, vagues de chaleur, ouragans, inondations...(intensification de l'évaporation près de l'équateur) • crise de l'eau potable (fonte des grands glaciers continentaux) • irréversibilité: fonte du pergélisol 1700 Milliards de tonnes de CO2 (augmentation potentielle de 50% du CO2 de l'atmosphère)
origine du réchauffement CO2 augmentation de l'effet de serre d'origine anthropique CO2 et CH4 émis par l'activité humaine utilisation de combustibles fossiles (pétrole, gaz, charbon, lignite) pour produire l'énergie consommée. CH4 NOx
des responsabilités inégales: émissions annuelles de CO2 de quelques pays en 2010 Pays t/hab France 5.52 Suède 5.07 Danemark 8.48 ~ 80% de plus de CO2 par habitant Allemagne 9.32 que France-Suède Royaume uni 7.78 Chine 5.40 comparable à France - Suède Inde 1.39 Ethiopie 0.04 USA 17,31 3.5 fois plus que France-Suède Australie 17.00 Canada 15.73 Qatar 36.90 !!!!!! moyenne mondiale: 30 Gt/an pour ~ 7 milliards d'habitants = 4.4 t/hab
émissions mondiales de gaz à effet de serre (GIEC 2014) protocole de Kyoto: - 5.2% en 2010 / 1990 en réalité: + 50% ( + 2% par an) !! N2O CH4 CO2 forêts etc. CO2 combustibles fossiles
Comment limiter le réchauffement à +2° en 2100 ? 5ième rapport du GIEC (2014) scénario RCP2.6 : atteindre 450 ppm CO2 seulement en 2100 inverser immédiatement la tendance actuelle (+2% /an) - 50 % en 2050 et – 100% en 2100
Que faire en France ? Emissions de CO2 en France: beaucoup moins que d'autres pays développés grâce au nucléaire beaucoup plus que les pays en voie de développement, lesquels ont un droit légitime à se développer, et ne sont pas responsables de la situation actuelle => réduire de 75% en 2050 (c'est le "facteur 4") Ce problème difficile n’a pas de solution miracle. La solution n’est pas unique et elle n’est pas gratuite. Nécessite un effort soutenu de recherche scientifique et technique Le rapport du Comité de prospective en énergie de l’Académie des sciences propose une série de recommandations
Recommandation 1: diversification des ressources, réduction des énergies fossiles insertion d’énergies renouvelables dans le « mix » énergétique futur en maîtrisant leurs intermittences. trouver des solutions au problème du stockage de l’énergie et à celui de l’extension du réseau de transport d’électricité. • rappel: l’énergie nucléaire permet • (1) de réduire la dépendance par rapport aux énergies fossiles, • (2) d’assurer une continuité de production massive d’électricité irremplaçable par les énergies renouvelables, • (3) d’avoir un coût compétitif, • (4) de s’appuyer sur un outil industriel complet, un retour d’expérience et une compétence en matière de sûreté. 9
émissions de CO2 par secteur en France données corrigées des variations climatiques en Mt; chiffres Ministère de l'Ecologie du Developpment durable et de l'Energie développement de la production nucléaire transports résidentiel-tertiaire énergie - transports en commun électriques, voitures électriques (hydrogène?), ferroutage - isolation thermique des bâtiments (10 G€ ~ 1 à 2 EPR ~ isoler 500 000 logements ~ économie 500 MW ~ 250 M€/an) industrie agriculture - énergie décarbonée: renouvelables + Nucléaire - remplacer les fossiles par de l'électricité dans l'industrie? - capture + stockage du CO2 ?
recommandation 2: • nécessité d’un effort de recherche, de développement et d’innovation ciblé sur toutes les composantes du mix énergétique futur, incluant • (1) une meilleure utilisation des énergies fossiles, • (2) l’exploitation des carburants de synthèse, • (3) le développement des énergies renouvelables, bio-sourcées et nucléaires, • (4) le problème majeur du stockage de l’énergie, • (5) la capture, le stockage ou la valorisation du CO2 Conférence de presse, 14 janvier 2013 11
intermittence: éolien et photovoltaique remplacer l'EPR Flamanville? il faudrait un champ de 3000 éoliennes géantes sur 150 x 20 km2 Il y aurait toujours du vent quelquepart ? sept 2010 à mars 2011 les fluctuations sont de l'ordre de la puissance moyenne, elle même environ 6 fois moins que la puissance installée. En Allemagne, on compense les fluctuations en brûlant du lignite: pas cher, désastreux pour le climat
coût d'installation / coût de production éolien / nucléaire de 3ième génération (EPR) l'éolien en mer est 10 fois plus cher à installer que l'EPR exemple: mars 2012 deuxième appel d'offre éolien en mer du MEDDE 3.5 Milliards d'Euros (3.5 G€) pour 200 éoliennes géantes puissance installée: 1000 MW (5MW chacune) mais puissance produite: ~350 MW donc 3.5 G€ pour 350 MW pendant 20 ans sans compter les centrales thermiques à construire pour pallier l'intermittence EPR Flamanville: 7G€ pour une puissance installée de 1600 MW, production ~ 1440 MW pendant 60 ans le coût de production est seulement 2 fois plus cher (éolien / nucléaire) d'après le rapport "énergies 2050" de J. Percebois et C. Mandil pourtant le tarif d'achat négocié a atteint 268 €/MWh pour l'éolien en mer en avril 2012 alors que l'électricité nucléaire est vendue à 59 €/MWh En Allemagne, l'électricité est 2 fois plus chère qu'en France...
comment stocker l'énergie intermittente ? • pomper l'eau : barrage de Grandmaison - Suisse • en haut des falaises en bord de mer ? • les batteries ou accumulateurs sont limités par l'énergie d'une liaison chimique • usage individuel pour des voitures électriques à recharger la nuit • mais pas pour un usage collectif: exemple 1000 tonnes de batteries Ni-Cd ne permettent de stocker que 47 MWh soit 900 MW pendant 3 minutes. • malgré ces limitations, la recherche progresse. Les accumulateurs Li-CoO2 atteignent 200 Wh/kg donc 4 fois plus. • stockage par électrolyse de l'eau => hydrogène ?
le barrage de Grandmaison entre Bourg d'Oisans et le col de la Croix de Fer puissance de pompage: 1800 MW soit 2 réacteurs nucléaires de 900 MW turbinage: 1400 MW soit 1,5 réacteur nucléaire stockage max 400 GWh = 18,5 jours d'un réacteur nucléaire
les énergies solaires beaucoup d'énergie disponible partout: moyenne 150 W/m2 en France pour produire 1GW : 60 km2 de panneaux avec un rendement permanent de 10% ... Mais il n'y a pas de soleil la nuit... solaire thermique : préchauffer l'eau avec des tuyaux noirs sous verre et au soleil, échelle individuelle, stockage local (eau chaude), haute température (concentration) et électricité thermodynamique : recherches en cours (puissance (~20 MW) , pallier l'intermittence...) solaire photovoltaïque produire de l'électricité avec des panneaux en Silicium ou autres semiconducteurs intermittent comme l'éolien supprimer l'obligation d'achat ruineuse (74 à 314 €/MWh !)? produire de l'hydrogène sans CO2 ? mais comment le stocker? Le rendement s'améliore (16% aujourd'hui, 40% à l'avenir?) mais on ne sait pas stocker l'électricité en grande quantité; adapté aux pays chauds sans réseau électrique (un réfrigérateur en Afrique profonde)
Rcommandation 3: augmenter l’efficacité énergétique dans tous les domaines, notamment: - habitat (isolants haute performance, matériaux de stockage/restitution de la chaleur …) - transports (nouvelles technologies de combustion et hybridation électrique/thermique) - rechercher des solutions nouvelles. Exemple: PSA vise 2 litres aux 100 km (projet financé par l'ADEME) avec le projet "hybrid-air" une combinaison essence – air comprimé
biocarburants • l'éthanol (produit à partir de canne à sucre ou betterave) est incorporable à l'essence 5 à 25%) • le biodiesel (produit à partir d'huiles de colza, tournesol etc.) est incorporable au diesel (7 à 30%) • hydrogénation des huiles végétales => biokérosène pour avions? • attention aux émissions de N2O (effet de serre 300 x CO2 !), aux rendements faibles à l'hectare (photosynthèse: 0.5% !), à la concurrence avec l'alimentation • méthanisation ? • 2nde génération: utilisation des déchets lignocellulosiques (recherches en génie chimique en cours) • 3ième génération: algues?
sûreté du nucléaire le risque zéro n'existe pas Three Miles Island – Tchernobyl – Fukushima En France: retour d'experience après chaque accident Fukushima était stable, comme tous les réacteurs français, mais construit au bord de l'eau dans une zone de très forte sismicité (magnitude 9; 60 m de déplacement, raz de marée avec vagues de 30 m de haut!) 18000 morts dus au Tsunami, 0 par irradiation. analyse: 1- sous-estimation du danger potentiel des tsunamis 2- moyens de secours insuffisants et gestion de crise approximative 3- Les réacteurs n’étaient pas équipés de recombineurs pour l’hydrogène émis en cas de fusion du combustible 4- explosion de gaz, pas nucléaire (le réacteur était arrêté mais encore chaud) Tchernobyl était intrinsèquement instable et a explosé après la déconnexion des sécurités par le personnel . Emballement de la réaction nucléaire. Rejets de radionucléides (~10 fois plus que Fukushima) à des km d'altitude et à l'échelle d'un continent
la sûreté en France s'appuie sur une séparation claire entre l'opérateur (EDF) et l'Autorité de Sureté Nucléaire, l'ASN, autorité indépendante qui s'appuie sur les 1000 chercheurs de l'IRSN retour d'expérience après tout accident , léger ou grave. améliorations de la sûreté imposée sur les réacteurs anciens (inutile sur l'EPR): - tripler les systèmes de refroidissement en cas de double interruption (eau + électricité) - renforcement du radier dans le cas extrême d'une fusion du coeur 60 à 200 M€ par réacteur (soit moins de 1% de l'électricité produite en 20 ans)
l'avenir du nucléaire: la 4ième génération transformer les déchets en combustible réacteurs "à neutrons rapides" brûler tout l'Uranium 238 appauvri en 235 => de l'énergie abondante pendant des milliers d'années. Une question centrale, la sûreté des réacteurs à neutrons rapides et à refroidissement au Sodium dits "RNR-sodium": ASTRID pour améliorer Superphénix. Autres directions de recherche possibles: petits réacteurs: 300 MW au lieu de 1600 (EPR)? refroidissement au Plomb ou à l'hélium sous pression? filière Thorium ? incinération des actinides restants
de multiples autres questions • hydrogène: un vecteur, pas une source d'énergie • des "réseaux intelligents" pour lisser les fluctuations des énergies intermittentes ? • capture, stockage et valorisation du CO2? • biocarburants (2 et 3ième génération: déchets, algues ?) • gaz de schiste: ressources réelles, conditions d'exploitation GIEC 2014: on ne peut pas se passer du nucléaire, énergie massive et décarbonée
Synthèse Diversifier les sources d'énergie en mettant l'accent sur les énergies renouvelables, mais en développant l'énergie nucléaire pour ses nombreux avantages Soutenir l’effort de recherche, technologie, innovation Rechercher des solutions au problème de l'intermittence des énergies renouvelables. Concentrer l’effort sur le stockage massif d'énergie électrique, l'interconnexion et les réseaux intelligents Améliorer l'efficacité énergétique (bâtiments, transports…) Revoir la question de gaz de schiste et permettre l’exploration afin d’examiner le potentiel. Définir des règles d'exploitation préservant l’environnement Recommander aux décideurs de faire des choix fondés sur l’analyse scientifique prenant en compte les capacités et les atouts industriels, les questions environnementales, les risques, les avantages et les inconvénients de toutes les filières, les objectifs économiques fondamentaux et la nécessaire indépendance énergétique