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La nécessité d’une grande réforme fiscale est souvent évoquée dans le débat public. Certains préconisent une forte réduction des prélèvements obligatoires (ce qui suppose de diminuer d’autant les dépenses publiques).
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La nécessité d’une grande réforme fiscale est souvent évoquée dans le débat public. Certains préconisent une forte réduction des prélèvements obligatoires (ce qui suppose de diminuer d’autant les dépenses publiques). D’autres veulent augmenter fortement les impôts pour réduire rapidement le déficit public. Mais est-ce possible sans peser sur le niveau d’activité ? D’autres proposent de répartir plus équitablement la charge fiscale entre revenus du travail et du capital, d’augmenter le caractère redistributif du système, de taxer plus fortement les revenus et les patrimoines les plus élevés. Mais la France est déjà l’un des pays les plus redistributifs, qui taxe le plus les riches et les revenus du capital. Certains proposent de simplifier le système français, de faire la chasse aux niches fiscales et sociales, d’élargir les assiettes et de diminuer les taux. Mais, n’est-ce pas oublier le rôle incitatif de la fiscalité ? De nombreux dispositifs sont justifiés (quotient familial, exonération bas salaires). Quelle réforme fiscale ?
Rendre notre fiscalité plus écologique est une voie prometteuse, mais a-t-on vraiment un double dividende en emplois et en écologie ou le gain écologique n’a-t-il pas un coût en termes de croissance, et donc en emplois ? Comment concilier les préoccupations écologiques et celles de recettes fiscales ? Peut-on faire une telle réforme sans une forte harmonisation européenne et mondiale, aujourd’hui peu probable ? De façon plus générale, l’harmonisation fiscale européenne reste un futur sans doute inévitable. Mais celle-ci peux obliger la France à s’aligner sur le moins-disant fiscal (en matière d’ISF ou de cotisations sociales, par exemple). Quelle harmonisation : libérale ou sociale-démocrate ? On peut craindre que les évocations récurrentes de réforme fiscale ne soient un leurre, masquant le refus de s’attaquer aux problèmes effectifs de l’économie française : la croissance des inégalités de revenus provenant de la financiarisation de l’économie et de la constitution d’une couche étroite de dirigeants d’entreprise ; l’insertion dans la nouvelle division internationale du travail ; l’incapacité de l’Europe à repartir après la crise financière. Quelle réforme fiscale ?
Le système fiscal français prélève 45 % du PIB ; les dépenses publiques primaires représentent 50% du PIB. En même temps, la France est un des rares pays de l’OCDE où les inégalités de revenus ne se sont pas fortement accrues dans la période récente. Ce fort niveau de dépenses publiques et sociales constitue un choix de société qu’il faut maintenir ; le système fiscalo-social français est déjà fortement redistributif. Certaines réformes sont nécessaires pour améliorer encore sa redistributivité, pour le rendre plus transparent et plus acceptable socialement. Cependant, il n’y aura pas de réforme miracle : le système actuel est le produit d’un long processus de compromis économique et social de sorte que l’améliorer est difficile. Quelle réforme fiscale ?
Quelle réforme fiscale ? • Il ne faut pas attendre de miracle de la réforme fiscale. • Quatre axes : • réaffirmer le principe selon lequel tous les revenus des ménages doivent être soumis à l’impôt sur le revenu et que celui-ci doit appliquer strictement le principe : « chacun doit contribuer aux dépenses publiques selon ses capacités contributives » ; • réaffirmer le principe selon lequel tous les revenus du travail doivent payer des cotisations sociales, tous les revenus du capital les prélèvements sociaux ; • partager des dépenses fiscales en trois catégories : les dépenses fiscales qui ne font que déterminer la capacité contributive des ménages (qui doivent être maintenus et ne plus être considérées comme des dépenses fiscales) ; celles qui sont des subventions sociales ou économiques (qui doivent être repensées et transformées en subventions explicites) ; les autres qui doivent être supprimées ; • faire monter en puissance la fiscalité écologique, maintenir la fiscalité sur le capital, réduire la fiscalité portant sur le travail.
Une société mixte…. • 50% du PIB est redistribué par l’Etat. Ceci correspond à un choix français (et même européen) d’une société mixte, un compromis entre socialisme et capitalisme, où une partie importante des besoins des ménages sont couverts de manière socialisé, soit par des prestations en nature (enseignement, santé, garde d’enfant), soit par des prestations en espèces qui peuvent être universelles (allocations familiales), d’assistance (minimum vieillesse, RSA) ou d’assurance sociales (retraites, chômage). • La crise de 2007-2009 a décrédibilisé le modèle anglo-saxon, qui creuse les inégalités sociales et s’appuie sur une insoutenable financiarisation de l’économie. Par contre, la réussite du modèle scandinave montre qu’il est possible de concilier de bonnes performances économiques et un niveau important de dépenses publiques, gérées de façon efficace ; des taux élevés de prélèvements obligatoires et d’emplois. Ainsi, le fort taux d’emploi des femmes s’appuie-t-il sur le développement des services publics de gardes d’enfants et d’aides aux personnes âgées ; le fort taux d’emploi général sur la qualité de l’enseignement ; celui des seniors sur le souci de qualité de l’emploi.
Une fiscalité élevée…. • La fiscalité doit être socialement acceptable et accepté. Ceci implique qu’il doit reposer sur le principe : « chacun doit contribuer aux dépenses publiques selon ses capacités contributives ». Aucun revenu ne doit être sur ou sous-taxé. • Elle doit être redistributive, c’est-à-dire viser à aboutir à une distribution des revenus équitable. • Elle doit être incitative à des comportements socialement utiles, par exemple en favorisant l’emploi et les économies d’énergie ; en décourageant la pollution et les comportements socialement coûteux (tabac, alcool). • Elle doit correspondre aux dépenses ; il est légitime que les prestations d’assurances sociales ne soient payées que par des cotisations assises sur les revenus des personnes couvertes ; il est légitime que les plus riches (en revenu et en patrimoine) qui bénéficient plus que les autres de l’organisation de la société en supportent plus que les autres les frais de fonctionnement.
La progressivité de l’impôt a trois justifications : elle rend la redistribution des revenus plus égalitaire ; les capacités contributives des riches sont plus fortes (100 euros de moins par mois a moins d’impact sur le bien-être d’un individu qui en gagne 10 000 que sur le bien-être d’un individu qui en gagne 1 000) ; elle correspond au fait que les plus riches profitent plus de l’organisation sociale et de certaines dépenses publiques (éducation supérieure, infrastructures, police,…). Nous héritons d’un patrimoine commun : il faut taxer les hauts revenus et assurer un revenu minimum. Les dépenses fiscales qui ont un rôle incitatif peuvent entrer en contradiction avec les objectifs de redistribution, d’égale contributivité, de progressivité, de simplicité et de transparence. Certains impôts (la TVA, la CSG, les cotisations sociales) aient pour mission de collecter des ressources, d’autres (l’IR, l’IS, l’lSF) aient des rôles d’incitation et de redistribution. Une fiscalité resdistributive….
En 2011, la France arrivait au deuxième rang des pays de l’OCDE pour le montant des dépenses publiques relativement au PIB (56,2 %), derrière le Danemark (59,3 %). Ce chiffre est temporairement gonflé par la dépression. Le montant des dépenses publiques primaires (hors charges d’intérêt) représente environ la moitié du PIB potentiel. Depuis 1983, il n’y a pas eu de fortes hausses des dépenses publiques ; celles-ci ont été gérées avec rigueur. Ainsi, depuis 15 ans, le poids des dépenses publiques primaires rapportés au PIB potentiel n’a-t-il que très légèrement augmenté en France (+1,1 point de PIB) ; les dépenses publiques primaires en volume ont augmenté de 2 % par an, en moyenne, mais le PIB n’a crû lui que de 1,7 % l’an. Dans la zone euro, malgré les pressions de la Commission, la part des dépenses publiques a connu une certaine hausse durant les 15 dernières années (0,5 point de PIB). La hausse a été plus nette dans les pays anglo-saxons. Un niveau important de dépenses publiques
Poids des dépenses publiques dans le PIB Source : OCDE, Perspectives économiques, novembre 2011.
La plupart des dépenses publiques sont des transferts en direction des ménages ou des dépenses profitant directement aux ménages. L’écart de dépenses de la France avec les autres pays européens est particulièrement net dans le domaine de la protection sociale auquel la France consacre 4 points de PIB de plus que la moyenne de la zone euro. Aussi, toute baisse importante du taux de prélèvement obligatoire, passe-t-elle par une privatisation, sous une forme ou une autre, de dépenses profitant directement aux ménages. Que va faire le gouvernement qui doit réduire de 70 milliards les dépenses publiques ? Beaucoup proposent une stratégie de recherche de compétitivité, passant par une forte baisse des prestations sociales permettant une baisse des cotisations sociales employeurs. Cette stratégie pèserait sur les ménages, qui devraient s’assurer auprès de mutuelles ou d’assurances privées, pour leurs dépenses de santé. Elle aboutirait à un système plus coûteux et plus inégalitaire. Il faut séparer les deux objectifs, d’un côté, il faut gérer la protection sociale selon ses objectifs propres, de l’autre, la compétitivité doit être recherchée soit par la R&D, par l’innovation, soit, en dernier recours, par une baisse des salaires (et des dividendes) versés par les entreprises. Rien ne justifie a priori que la compétitivité soit recherchée en priorité par la baisse des dépenses sociales. Un niveau important de dépenses publiques
Dépenses publiques par fonction (2010) Source : OCDE, Base de données.
Globalement, la France a maintenu un niveau élevé de protection sociale, qui fait que les inégalités de revenu et les taux de pauvreté sont plus bas que dans les pays méditerranéens ou anglo-saxons, qu’elles ne se dégradent pas comme dans les pays scandinaves ou l’Allemagne. En même temps, la France n’a pas échappé à la hausse des très hauts salaires et revenus. Ainsi, la part dans la masse salariale brute totale des 1 % les mieux rémunérés est-elle passée de 5,5 % en 1996-1998 à 6,9 % en 2008. Ainsi, de 2004 à 2008, le nombre de foyers redevables de l’ISF a augmenté de 69 % (malgré l’indexation du barème) .La part des revenus déclarés des 0,1 % des plus riches est passée de 1,72 % à 2,03 % ; celle des 1 % les plus riches de 6,48 % à 7,07 %. Le rapport des revenus des déciles D10/D1 passe de 16,5, avant redistribution à 5,6, après (tableau 4). Le système français est fortement redistributif, principalement en raison des prestations sociales. Par contre, le rôle redistributif de la fiscalité est moins net, particulièrement pour les plus hauts revenus. La résistance au creusement des inégalités.
Taux de pauvreté en Europe Source : Eurostat.
Bilan de la redistribution : revenu primaire et disponible (2010). Source : INSEE, (2011) : France, portrait social.
La France est au cinquième rang des pays de l’OCDE pour le taux de prélèvements obligatoires. Comparée à celle de ses partenaires européens, et en particulier à l’Allemagne, la France a quatre caractéristiques : La France a deux impôts sur le revenu (IR et CSG) dont le total est relativement faible. En sens inverse, la taxe d’habitation est relativement lourde. Les cotisations employeurs sont importantes (surtout si on y ajoute la taxe sur les salaires). Les cotisations salariés sont faibles. La taxe professionnelle est lourde. Les impôts sur le capital sont élevés alors que les impôts sur la consommation sont plutôt faibles. Une fiscalité importante et spécifique
Taux de prélèvement obligatoire Source : OCDE (2011), Statistiques des Recettes publiques.
Recettes fiscales en % du PIB (2007) * Essentiellement la taxe professionnelle; ** Essentiellement l’IRAP.; Source: OCDE (2011), Statistiques des recettes publiques.
Taux d’imposition implicite (2010) Source : Eurostat, Taxation trends in the European Union, 2012.
Il n’y a pas de raison de penser que l’alignement sur nos partenaires européens (en particulier l’Allemagne) devrait être la norme. Il est normal que les cotisations sociales soient fortes dans un pays où les prestations d’assurances sociales sont élevées. Le niveau élevé des cotisations employeurs est, en partie, compensé par le niveau des salaires nets. Ces chiffres pourraient suggérer que la France devrait augmenter le poids de l’impôt sur le revenu et diminuer celui des cotisations employeurs, en faisant financer par l’impôt, les prestations familiales et santé, ce qui serait s’engager à plein dans la stratégie de concurrence fiscale. Une fiscalité importante et spécifique
Le bilan fiscal du quinquennat du Président Sarkozy illustre l’impossibilité d’une réforme libérale de la fiscalité française. L’objectif de forte réduction du taux de prélèvement obligatoire n’a pas été atteint : celui-ci était de 43,7 % en 2007 ; il devrait être de 45,1 % en 2012. Nicolas Sarkozy a certes réduit la fiscalité portant sur les heures supplémentaires (de 4 milliards). Il a réduit l’ISF (d’environ 2 milliards) et les droits de successions (de 1,4 milliard). Par contre, il a alourdi de 2 milliards la fiscalité sur les plus-values immobilières ; de 10 milliards la fiscalité sur les revenus du capital des ménages ; de 2,7 milliards l’IR. Au total, la fiscalité sur les ménages a augmenté de 11,5 milliards. il a augmenté de 4,5 milliards les impôts indirects (mutuelles santé, tabacs-alcool, baisse TVA restauration). Les réductions d’impôt sur les entreprises n’ont été en net que de 2 milliards (IS, exo charges sociales, forfait social, versus CIR et TP). La « grande réforme » n’a pas été esquissée. La politique fiscale de Nicolas Sarkozy…
Les Cotisations sociales employeurs sont très fortes. Le CS retraite et chômage ouvrent des droits et doivent payer par les personnes concernées. Rien ne justifie les CSE maladie et famille, qui n’ouvrent pas de droit (17,45 points). Le système français de CS est progressif : exonération pour les bas-salaires +RSA+PPE ; pas de plafond de cotisations pour les hauts salaires. La réforme est difficile. Les exonérations représentent 32 milliards d’euros. On ne peut les supprimer en période de chômage des non-qualifiés. La réduction actuelle des cotisations sociales au niveau du SMIC (26 points) est supérieure aux cotisations employeurs, maladie et famille (17,45 points). Cinq projets : CSVA, taxation écologique, CSG neutre, CSG avec transfert, TVA sociale. La réforme du financement de la Sécurité sociale
Part des CSE dans la VA des SNF Part des cotisations sociales employeursdans la valeur ajoutée des sociétés Source : Comptabilité nationale, INSEE.
La suppression de l’ensemble des cotisations employeurs, famille et maladie (17,45 points soit 98 milliards) nécessiterait la création d’une Contribution Sociale sur la Valeur Ajoutée de 8,3 % : 29 milliards d’euros pèseraient sur le capital au lieu de peser sur le travail. La réforme aurait quatre conséquences : Le coût relatif travail/capital serait réduit ce qui inciterait les entreprises à utiliser moins de machines et plus de main-d'œuvre. Le coût absolu du travail serait abaissé ce qui favoriserait les activités de services. Les ménages seraient incités à se tourner vers des produits à fort contenu en emplois dont le prix relatif diminuerait au détriment des produits à fort contenu en capital. La mesure réalisait un transfert des entreprises fortement capitalistiques vers les entreprises utilisant beaucoup de travail. Elle pourrait créer 600 000 emplois (+3%) La CSVA
Selon certains, ce transfert nuirait aux capacités des entreprises d'innover et de se moderniser. Toutefois, une modernisation consistant à substituer du capital au travail est nuisible en situation de chômage de masse. La mesure serait nuisible aux entreprises à fort profit et favorisera les entreprises de profit faible ou nul. Ce peut être considéré comme dangereux pour le dynamisme économique. En sens inverse, certaines entreprises peuvent être en difficulté parce qu’elles utilisent beaucoup de travailleurs et sont concurrencées par la production des pays à bas salaires. Se pose une question de transition. La mesure nuit à des techniques et à des entreprises existantes pour favoriser de nouvelles entreprises ou de nouvelles techniques. La mesure fournirait un avantage de compétitivité à la France pour les secteurs employant beaucoup de main-d’œuvre et une perte pour les secteurs capitalistiques. Le risque est que le premier effet jouerait peu (en raison des écarts de coût de main-d’œuvre entre la France et les pays émergents) et le second joue beaucoup (en raison de la concurrence des autres pays européens En 2007, cette réforme nécessitait la création d’un nouveau prélèvement, avec une nouvelle assiette, la valeur ajoutée, Mais, depuis, la création de la CVAE, pour remplacer en partie la taxe professionnelle, crédibilise fortement la proposition : il suffit de la faire monter en puissance de 1,5 à 9,8%. Le débat de 2007 avait écarté cette mesure en la jugeant trop risquée, en jugeant aussi que ralentir la substitution capital/travail n’allait pas dans le bon sens. La CSVA
Les exigences d’économie d’énergie et de réduction des émissions de gaz à effet de serre rendent nécessaire d’instaurer des taxes écologiques. En situation de chômage de masse, on peut penser que, toute hausse de la fiscalité écologique doit être compensée par une baisse des cotisations employeurs. L’avantage est que globalement la charge supportée par les entreprises n’augmente pas, donc a priori leurs prix ; la compétitivité globale des entreprises n’est pas affectée ; mais celles-ci sont incitées à utiliser plus de travail et à polluer moins. Ces dispositifs s’inscrivent dans la logique du « double dividende » : les écotaxes auraient la double vertu d’inciter à réduire les usages de produits polluants et de permettre, grâce aux recettes ainsi perçues, d’alléger les prélèvements pesant sur le coût du travail. Les entreprises doivent utiliser plus de travail et moins d’énergie.. La taxation écologique
Il existe une contradiction entre la préoccupation écologique (une taxation forte et ciblée peut être si dissuasive que son rendement ex post est faible) et la préoccupation fiscale : la taxe doit être rentable pour dégager des marges de manœuvre afin de diminuer fortement les CSE. Exemple : taxe sur le diesel. Une telle réforme devrait être coordonnée à l’échelle mondiale, pour éviter que certains pays pauvres ou émergents deviennent une terre d’accueil pour les entreprises polluantes. Mais les pays pauvres et émergents ne sont disposés à accepter un accord que si celui-ci est dissymétrique : une partie des gains de la taxe prélevée dans les pays développés doit être utilisée pour aider les pays pauvres à faire les efforts nécessaires (adoption de techniques de production moins polluantes). Une partie de la taxe doit être utilisée pour aider les ménages pauvres frappés. La piste la plus prometteuse pour notre compétitivité serait une écotaxe qui dont le produit servirait à réduire les cotisations sociales employeurs et qui nous permettrait de taxer les produits importés provenant de pays qui n’appliquent pas d’écotaxe. On aurait ainsi un triple dividende. Mais, l’OMC sera-t-elle dupe ? La taxation écologique
Cette réforme pourrait se faire selon quatre modalités : A salaire inchangé, elle provoquerait un important transfert des ménages vers les entreprises. Les entreprises gagneraient 17,45 % de la masse salariale brute que perdraient les ménages, soit de l’ordre de 5,5 % du PIB. C’est la stratégie de concurrence salariale. Les salariés pourraient bénéficier d’une hausse de salaire compensatrice de 17,45 % La CSG pourrait passer à 22,3 % sur les salaires : dans ce cas, la mesure serait totalement neutre. Les salariés pourraient bénéficier d’une hausse de salaire compensatrice de 17,45% ; la CSG pourrait passer de 8 à 18,5 % sur tous les revenus. En pouvoir d’achat, les salariés gagneraient ainsi 4,8 % ; les retraités et les rentiers perdraient 10,5% en CSG sans contrepartie.. On pourrait introduire des mesures compensatoires pour les rentiers ou les retraités, les victimes de la réforme, et parvenir ainsi à la neutralité. Remplacer les CSE par la CSG
Peut-on remplacer des points de CSE par des points de TVA pour faire payer notre protection sociale la protection sociale par les machines ou par les producteurs étrangers. La TVA ne frappe pas les biens capitaux car elle est remboursée sur l’investissement. Elle ne frappe que le travail. Le ripage CSE/TVA est neutre pour le coût relatif capital/travail .Il est neutre au niveau des secteurs : les branches qui utilisent beaucoup de machines bénéficieraient peu de la baisse des CSE, mais souffriraient peu de la hausse de la TVA (puisque la TVA sur investissement est remboursée). En économie ouverte, la TVA frappe les importations et est remboursée à l’exportation. Il y aurait un gain de compétitivité, mais les prix des produits importés augmenterait, ce qui entrainerait des hausses de prestations et de salaires du fait de l’indexation. Le gain de compétitivité ne persiste que si les salaires et prestations subissent des pertes de pouvoir d’achat. C’est une stratégie de dévaluation fiscale. La seule réforme fiscale qui fournirait des gains de compétitivité sans diminution du pouvoir d'achat des travailleurs serait d'achat serait de créer un droit de douane spécifique sur les produits importés et d’en utiliser le produit pour réduire la TVA, mais ceci nous est interdit par les règles de l’UE et de l’OMC. La TVA sociale
Supposons que l’on augmente la TVA de 5 points en baissant les cotisations sociales de 6 points. Le lendemain de la réforme, les prix à l’importation augmentent de 5 % ; les prix à l’exportation baissent théoriquement de 5 %. Les prix à la consommation augmentent de 1,25 % (les importations représentant 25 % du marché national). Les entreprises ont bien obtenu des gains de compétitivité de 5 %, mais grâce à une perte de 1,25 % du pouvoir d’achat des ménages. Deux stratégies sont alors possibles : Soit laisser jouer les mécanismes d’indexation, qui impliquent l’augmentation du SMIC, des salaires, des retraites ; ces augmentations se répercutent dans les prix, puis de nouveau dans les salaires, jusqu’à ce que les prix intérieurs aient augmenté de 5 % ; le gain n’a donc été que temporaire. Le risque inflationniste est d’autant plus fort que les entreprises ne répercutent que lentement la baisse de leurs charges tandis que les distributeurs répercutent immédiatement l’augmentation de la TVA Soit bloquer salaires et prestations. Les gains de compétitivité peuvent alors être permanents. Mais il faudra annoncer clairement que la TVA sociale fera baisser le pouvoir d'achat des salaires et des retraites, ce qui n'est guère social. La TVA sociale
La compétitivité de l’économie française ne sera améliorée que dans la mesure où l’augmentation des prix des biens de consommation importés n’est pas répercutée dans les salaires. Recourir à la TVA sociale n’a donc de sens que si on accepte de réduire le pouvoir d’achat des salaires et des retraites. La TVA sociale n’est donc pas un outil miracle qui fournirait des gains de compétitivité sans perte de pouvoir d’achat des salariés ou des retraités. Il ne faut pas se nourrir d’illusion : chaque pays doit financer sa protection sociale. La TVA sociale ne favorise pas le travail au détriment du capital. A pouvoir d'achat donné des salariés, TVA et cotisations sociales employeurs ont à peu près le même impact macroéconomique. La seule réforme fiscale qui fournirait des gains de compétitivité sans diminution du pouvoir d'achat des travailleurs serait d'achat serait de créer un droit de douane spécifique sur les produits importés et d’en utiliser le produit pour réduire la TVA, mais ceci nous est interdit par les règles de l’UE et de l’OMC. La TVA sociale
Faut-il compenser la baisse des cotisations employeurs par une hausse de la TVA ou de la CSG ? Les deux mesures sont approximativement équivalentes à salaires et retraites fixes en valeur nominale. Dans les deux cas, les ménages doivent subir des pertes de pouvoir d’achat. La hausse de la TVA s’accompagne d’une certaine hausse des prix. Théoriquement, les prestations sociales et le SMIC sont indexés. Ils ne subiraient donc pas de pertes de pouvoir d’achat. De plus, les salariés exigeraient des hausses de salaires pour compenser la hausse des prix. Ces indexations feraient progressivement perdre les gains de compétitivité ou de rentabilité. La mesure suppose donc un accord entre partenaires sociaux pour bloquer les salaires et les certaines prestations sociales en situation de hausse de l’inflation. Au contraire, les victimes de la hausse de la CSG ne pourraient profiter de mécanismes d’indexation plus ou moins automatiques et devraient accepter la baisse de leur pouvoir d’achat. Par ailleurs, la hausse de la CSG frapperait pas les plus pauvres des retraités des retraités et des chômeurs, qui n’en paient pas, ni les titulaires du RSA ou des prestations familiales. Un choc de compétitivité ?
En Novembre 2012, le gouvernement s’est engagé dans cette voie. Les entreprises bénéficieront d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) de 20 milliards, calculé comme 6 % de leur masse salariale entre 1 et 2,5 fois le salaire minimum. Ces 20 milliards de dollars serait financé pour 10 milliards par une diminution supplémentaire des dépenses publiques, par 7 milliards par une augmentation de la TVA et par 3 milliards par une augmentation de la fiscalité écologique en 2016. Ce crédit d'impôt n'est pas subordonné à aucune condition, mais les entreprises devront établir un rapport montrant que ces crédits ont été utilisés pour l'investissement, l'emploi ou la R & D. Ces 20 milliards représente une baisse de 2,5% du coût salarial total, seulement un tiers bénéficiera à l'industrie. On peut craindre que le gouvernement renonce, plus ou moins, à une stratégie active industrielle interventionniste en faveur d'une politique libérale: augmenter le bénéfice des entreprises dans l’espoir qu‘elles vont investir. Un choc de compétitivité ?
Il faut réaffirmer le principe : tout revenu des ménages doit payer la CSG-CRDS ; tout revenu d’activité doit payer les cotisations sociales, en particulier les cotisations maladie et famille ; tout autre revenu doit payer les prélèvements sociaux. Beaucoup de niches sociales ont déjà été supprimées grâce au forfait social et à la fin de l’exonération des heures supplémentaires. La suppression des niches sociales permettrait de gagner entre 3,5 et 19 milliards. Mais taxer les loyers implicites sera difficile. Supprimer les niches sociales
Les niches sociales en 2011 Source : calcul de l’auteur à partir de PLFSS (2012) : Annexe 5.
Gagnants et perdants Gagnants et perdants à la réforme des cotisations sociales employeurs
La taxation directe des ménages représente en 2011, 15,3 % du PIB. Elle comporte la CSG-CRDS (5% du PIB), les cotisations sociales n’ouvrant pas de droit (5% du PIB), l’impôt sur le revenu (2,3 % du PIB), la taxe d’habitation (1,1 %), les taxes foncières (0,7 %), les droits de succession et donation (0,4% du PIB), l’ISF (0,2 %), les droits de mutation à titre onéreux (0,2 %). L’impôt sur le revenu et l’ISF sont les seuls impôts progressifs, les seuls qui tiennent compte de l’ensemble des revenus et des caractéristiques du ménage. Leur poids dans le PIB est faible. Il est donc normal qu’ils soient, en eux-mêmes, fortement progressif. L’augmentation de leur poids serait donc nécessaire. En même temps, il faut tenir compte de l’ensemble du système : la particularité française est la coexistence d’un impôt sur le revenu, concentré et de faible rendement, d’une CSG proportionnelle et de cotisations employeurs non plafonnées et progressives (en raison de l’exonération sur les bas salaires). S’y ajoute la PPE, le RSA et les allocations logements. La progressivité du système français doit être évaluée en tenant compte de l’ensemble de ses composantes. Le point délicat est que d’un coté, pris globalement, le système est fortement redistributif, de sorte qu’il sera difficile de l’améliorer, de l’autre, que cette redistributivité est obtenu de manière compliquée. La taxation des ménages
Le système français d’imposition et de prestation est familial : quotient conjugal et quotient familial La société reconnait le droit des personnes à se marier (ou à se pacser), à fonder une famille, à mettre en commun leurs ressources. Elle évalue le niveau de vie des familles en divisant les ressources globales du foyer par un nombre de part fiscal. Ce système assure théoriquement l’équité horizontale familiale : deux familles de composition différente, mais de même niveau de vie supportent le même taux d’imposition ; de même, le RSA assure approximativement aux plus familles les plus pauvres le même niveau de vie, quelque soit leur composition. Je ne pense pas qu’il fasse remettre en cause le QC ou le QF. La taxation des ménages
Il faut comparer les taux d’imposition économique des différences catégories de revenus (en ne tenant pas compte des vraies cotisations, qui ouvrent des droits ; en tenant compte des fausses cotisations, de l’IS, de l’inflation, etc..). La France taxe fortement les hauts salaires (60 %). Au niveau du SMIC-célibataire, le taux d’imposition est de -7% (compte tenu des exo CSE, de la PPE et de l’AL). La comparaison avec nos partenaires amènerait plutôt à préconiser la stabilité du taux maximum d’imposition. En sens inverse, l’étirement de la hiérarchie salariale, les salaires exorbitants de certains chefs d’entreprise et des traders militent pour une tranche confiscatoire au-delà d’un certain niveau de revenu. C’est le but de la tranche à 75% On pourrait aussi sanctionner, par une taxe spécifique, les entreprises qui distribuent des revenus supérieurs à un certain niveau (20 fois le SMIC). La taxation est fortement redistributif
Les taux économiques sont nettement supérieurs aux taux affichés quand on tient compte de l’inflation ou de l’IS déjà versés. Les intérêts, les revenus fonciers, les dividendes et les plus-values taxés sont approximativement taxés comme les salaires les plus élevés. Il est donc erroné de prétendre que les revenus du capital sont taxés à des taux réduits. Quand ils sont effectivement taxés, ils le sont à des taux élevés. Le capital, est en principe déjà taxé comme le travail
Taux d’imposition maximal des revenus du travail Source : Calcul de l’auteur à partir de : OCDE : Taxing wages (2011).
La soumission des revenus du capital au barème de l’impôt sur le revenu peut être justifié pour des raisons d’affichage mais pas sur le plan purement économique. En ce qui concerne les revenus d’intérêt, c’est oublier le taux d’inflation. La tranche de 45 % correspond à un prélèvement de 116,,4 % sur le revenu réel d’un placement rémunéré à 4 % pour un taux d’inflation de 2 %. Les dividendes bénéficient d’un abattement de 40% puisqu’ils ont déjà payé l’IS ; la tranche de 45 % correspond ainsi à une imposition de 63,2%. Les plus-values taxés payent 87,1% qui passe à 71,7% au bout de cinq ans. Les plus –values non-taxées ont payé 34,34%. Le capital, est en principe déjà taxé comme le travail
En ce qui concerne les intérêt, on pourrait ne taxer que les intérêts réels. Le taux correspondant à 45% + 15,5% est de 58,2%. Le meilleur système serait celui où les entreprises distribueraient un « avoir fiscal » à leurs actionnaires, contrepartie de l’IS effectivement payé et où les actionnaires seraient imposés au prélèvement sociaux et au barème de l’IS sur le total : « dividendes + plus-values réalisées corrigées de l’inflation », quitte à prendre des mesures pour faire que toutes les plus-values soient un jour réalisées et taxées (voir plus loin). La taxation serait alors là aussi de 58,2%. Le capital, est en principe déjà taxé comme le travail
Le problème réside donc surtout dans les dispositifs qui permettent d’échapper à la taxation. Heureusement, les gouvernements sont progressivement revenus sur la plupart de ces dispositifs. Deux principes devraient être réaffirmés : tous les revenus du capital doivent être soumis à taxation. C’est aux émetteurs de convaincre les épargnants de l’intérêt du placement qu’ils proposent, l’Etat n’a pas à favoriser fiscalement telle ou telle forme de placement. Restent les PEA et certains contrats d’assurance-vie. Reste aussi la possibilité qu’utilisent les familles riches d’échapper à la taxation des plus-values par la donation aux enfants (en vie ou au moment du décès). Ainsi, un riche actionnaire peut loger ses titres dans une société ad hoc qui reçoit ses dividendes, utiliser les titres de cette société comme caution pour obtenir des prêts de sa banque qui lui fournissent les sommes dont il a besoin pour vivre et ainsi ne pas déclarer de revenu ; puis léguer les titres de cette société à ses enfants. Le trou noir de la fiscalité reste les loyers implicites, surtout que s’y ajoute la non-taxation des plus-values sur le logement principal. Le capital, est en principe déjà taxé comme le travail.
L’impôt de solidarité sur les grandes fortunes se justifie par cinq arguments. Les titulaires d’un patrimoine important bénéficient tout particulièrement de l’organisation sociale ; il est juste qu’il en supporte plus spécifiquement le coût. La répartition du patrimoine est plus inégalitaire que celle du revenu : ainsi, le ratio entre le 1er et le 9e décile est de 4,6 pour le revenu, de 217 pour le patrimoine ; aussi, la taxation du patrimoine est plus redistributive que celle du revenu. L’ISF ne taxe pas les biens professionnels ; il incite donc les chefs d’entreprises et leur famille à investir dans leur entreprise et à y rester impliqué. L’ISF peut obliger certains propriétaires de biens immobiliers non occupés ou sous-occupés à les mettre sur le marché. Fiscalement, l’ISF oblige certains détenteurs de portefeuilles immobiliers à vendre des titres, donc à réaliser des plus-values. Avant la réforme de 2011, le taux de l’ISF allait de 0,55 % à 1,8 %. L’ISF était lourde pour les titulaires de revenus d’intérêt et de dividendes (déjà taxés à 55 %), de revenus fonciers (déjà taxés à 56 %) ou de plus-values taxés (à 63 %), mais pas pour les propriétaires de leur résidence, ni pour les bénéficiaires de plus-values non-taxées. Le bouclier fiscal ne jouait pas de rôle correcteur, au contraire, puisqu’il bénéficiait essentiellement aux propriétaires de leur résidence et aux bénéficiaires de plus-values non déclarés. La réforme de l’ISF n’a que peu modifié ce bilan. Les grandes victimes restent les titulaires de revenus d’intérêt ; les gagnants les propriétaires de leurs logement et les bénéficiaires de plus-values non-taxées. Le poids de l’ISF
Le poids de l’ISF Taux d’imposition économique en 2011 avant la réforme de l’ISF Taux d’imposition économique en 2013 après la réforme de l’ISF * Rentabilité de 6 % ; ** Rentabilité de 8 %.
Deux mesures apparaissent indispensables. La première consiste à supprimer tous les dispositifs qui permettent d’échapper à la taxation des plus-values. Pour les plus-values mobilières, il serait légitime de supprimer les PEA et de faire payer l’impôt sur les plus-values latentes en cas de transmission par donation et héritage. Pour les plus-values immobilières, il faudrait ne permettre que la déduction de l’inflation pour les biens autres que la résidence principale et introduire une taxation des plus-values sur la résidence principale (avec une déduction de l’inflation + 2 % et un sursis d’imposition en cas de réinvestissement dans la résidence principale). La deuxième serait d’introduire progressivement une taxation des loyers implicites, par exemple en leur faisant payer les CRDS-CSG et les prélèvements sociaux. En contrepartie, les intérêts versés pourraient redevenir déductibles du revenu imposable, ce qui favoriserait les jeunes en phase de constitution d’un patrimoine au détriment des patrimoines détenus. Ceci fait, il faudra faire un choix politique : Soit supprimer l’ISF, puisque tous les revenus du capital seraient taxés à 60 % au moins. Soit considérer qu’il est normal que les patrimoines élevés contribuent en tant que tels aux frais de fonctionnement de la société, indépendamment des revenus qu’ils procurent. Dans ce cas, il ne faut jamais comparer le produit de l’ISF au revenu du patrimoine puisque le but de l’ISF est de faire contribuer les patrimoines en eux-mêmes. Le poids de l’ISF
En Europe, ne maintiennent un impôt sur le patrimoine que le Luxembourg, la France et la Suisse. Le poids des droits de succession est très faible sauf en Belgique, en France, aux Pays-Bas. L’Italie les a même supprimés Faut-il s’aligner ? Non, sans doute. Mais, la tentation de l’exil fiscal est grande pour les personnes fortunées. Il faut cependant distinguer deux cas : s’il s’agit d’une fortune en titres, l’exil ne coûte à la France qu’un manque à gagner fiscal et n’a guère de conséquences économiques ; s’il s’agit d’une fortune en biens professionnels, elle peut signifier la fermeture de l’entreprise et la perte de capitaux productifs. Aussi, la France a choisi d’exonérer les biens professionnels de l’ISF et d’une partie des droits de successions si les héritiers continuent à gérer l’entreprise. Certes, cette mesure est contraire à l’équité, mais c’est un moindre mal et il n’est pas mauvais de favoriser parfois le capital productif. Le poids de l’ISF