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Droit de la construction

Droit de la construction. Ecole nationale supérieure d’architecture de Versailles 2008-2009 Robert Carvais. Introduction On a souvent rapproché le droit de la construction du droit de l’urbanisme, soit les fusionnant arbitrairement, soit en les éloignant inconsidérément.

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Droit de la construction

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  1. Droit de la construction Ecole nationale supérieure d’architecture de Versailles 2008-2009 Robert Carvais

  2. Introduction On a souvent rapproché le droit de la construction du droit de l’urbanisme, soit les fusionnant arbitrairement, soit en les éloignant inconsidérément. On a ainsi inclus le droit de l’urbanisme dans une discipline plus large qui serait le droit de la construction en vertu du fait qu’on ne saurait mettre en œuvre une construction sans délimiter au préalable un droit de construire au sol qui dépendrait de l’urbanisme. Or cette conception est inexacte, pour plusieurs raisons : - Le droit de construire au sol n’appartient pas uniquement au droit de l’urbanisme. - L’appellation « droit de la construction » est marquée historiquement (période de la Reconstruction, Georges Liet-Veaux, professeur au CNAM). - Usant de pragmatisme, G. Liet-Veaux comprend dans son « Droit de la construction », et à juste titre, le droit immobilier et le statut des constructeurs. - Malaise inexpliqué entre ces deux droits qui font l’objet de publications séparées.

  3. Ainsi, les différences entre les disciplines ont plutôt faciles à souligner : - Leur contentieux dépend en principe d’ordre juridictionnel différent. - Leur législation est différentes (existence de codes distincts). Cependant, ces deux disciplines sont distinctes mais « reliées par leur domaine d’application ». Elles sont utilisés par des personnes identiques (maîtres d’ouvrages et maîtres d’œuvre) et elles interagissent l’une sur l’autre. Sect. 1 : Définitions Sect. 2 : Histoires Sect. 3 : Sources Sect. 4 : Enjeux

  4. Sect. 1 : Définitions « le droit de la construction est la branche du droit constituée par les règles et institutions juridiques relatives à l’édification des immeubles (bâtiments et autres ouvrages immobiliers) » (Roger Saint-Alary, 1970) Il complète le titre de son cours par « droit de la propriété urbaine ». Bien qu’il la considère comme une branche du droit, elle est pour lui « nouvelle, mixte et dépendante ». Le droit de la construction est-il pourtant une branche du droit ? En cela est-il « un ensemble cohérent et autonome de règles adaptées à un secteur déterminé d’activités » ? 1/- un secteur déterminées d’activités : le bâtiment 2/- un ensemble cohérent de règles : un code de la construction et de l’habitation 3/- un ensemble autonome de règles propres à la construction forgées à partir des disciplines classiques, mais qui renvoient leur propre spécificité aux branches classiques du droit. De plus, le droit de la construction se construit entre dirigisme et auto-régulation.

  5. Sect. 2 : Histoires Trois caractéristiques historiques : • Droit constitué lentement par sédimentation qui laisse en place les états antérieurs • Droit en liaison directe avec la technique de l’art de bâtir et la conjoncture économique du bâtiment • Droit essentiellement d’origine pratique (professionnelle et contentieuse) 4 étapes : 1/- Un droit corporatif depuis le Moyen-âge a/- La Chambre royale des Bâtiments (juridiction de la maçonnerie) (longévité; compétences; portée; justice de pairs; justice et police; contrôle des chantiers) b/- Un droit réglementaire issu de la pratique - Les Statuts de métiers du bâtiments à Paris mais aussi en province (Jean Beausire en réformant le métier de maçon réduit en art le droit de la construction,1694). Ils contiennent les règles professionnelles mais également le savoir-faire et souvent es considérations esthétiques (Besançon, 1587; Montpellier, 1586; Laon, 1661; Angers, 1645; Bordeaux, 1594)

  6. - Les règlements généraux : « Règlement général concernant les œuvres de massonnerie, pierre de taille, charpanterie, employ des matériaux pour la construction des batimens » doit « servir à l’advenir de Loy et de Regle, sous le bon plaisir de sa Majesté, pour tous ceux qui entreprendront lesdits bâtimens et constructions, et dont l’observation et execution fut appuyée de toute l’autorité du Consulat », Lyon, 1688; multiplication des ordonnances urbaines sur l’art de bâtir, Besançon, 1688). La codification est dans l’air du temps (projet privé Vauban, 1687; projets discutés de Boffrand, dans les années 1720-1730 ). - Les règlements particuliers : ordonnances de police rendues dans le cadre d’une affaire judiciaire et étendues à l’ensemble du métier (l’organisation corporative du travail : qui peut construire ? Selon quelles modalités ? À quel prix ? Sous quelles contraintes de sécurité ? La qualité du travail : savoir-faire et matériau. Rares considérations esthétiques. Le contrôle du travail et ses méthodes : réglementation de la police, déclarations de chantier, débauchage

  7. 2/- Un droit coutumier au bénéfice des architectes dès 1670 • Création de l’Académie royale d’architecture • Développement d’un enseignement de droit privé • Réflexion sur un savoir construit et normatif a/- Naissance d’une littérature juridique basée essentiellement basée sur le commentaire de coutumes de droit privé - Louis Savot (1579-1640), L’Architecture françoise des bastimens particuliers, Paris, 1624 (3 originalités : une économie du bâti, une bibliographie d’architecture et un commentaire de coutume); réédité en 1632 et 1642, 2 éditions illustrées par Fr. Blondel, 1673 et 1685) - Pierre Bullet (1639-1716), L’Architecture pratique, Paris, 1691 (véritable traité du toisé accompagné d’un commentaire de coutume); 20 éditions entre 1691 et 1838. - Antoine Desgodets (1653-1728), Les loix des bâtimens suivant la coutume de Paris, Paris, 1748 (cours de l’Académie annoté par un élève Martin Goupy); près de 20 éditions entre 1748 et 1857. [- Nicolas Delamare, Traité de la police, t. IV, Paris 1738 (par Le Clerc du Brillet), ouvrage historico-fondateur de la police en général et du bâtiment en particulier.]

  8. b/- Le droit de la construction : une composante du savoir expertal - La construction de la figure de l’expert : du maçon à l’architecte en passant par de simple bourgeois. Au Moyen-âge l’expert est maçon-juré, élu par ses pairs, puis érigé en titre d’office. Dès le début du XVIIe siècle, un conflit s’instaure entre les gens de métiers et les architectes naissants pour monopoliser les tâches d’expertise. En 1690, le roi qui défendait les maçons dans leurs fonctions est contraint de créer un corps d’experts à deux têtes composé d’une première colonnes de bourgeois architectes et d’une seconde d’entrepreneurs maçons. - Les finalités expertales : entre intérêt privé et service public Résoudre un conflit d’intérêt judiciaire ou amiable, une contradiction jusqu’à rendre compte de ses propres valeurs Accréditer un savoir-faire comme un laboratoire d’essai Gérer l’intérêt commun à travers la participation aux règlements

  9. 3/- Le droit de la construction aux mains des juristes à la Révolution Conseils des bâtiments civils Persistance de l’ancienne réglementation, malgré le Code civil Synthèse du droit public et du droit privé a/- Le droit de la construction au prétoire et au service des professions - La fortune du Desgodets (P. Lepage et H. Destrem, tous deux avocats)(référence au titre : le nouveau Desgodets; le territoire français; les juristes traitaient des questions de construction auparavant mais pas de manière spécifique; on passe du commentaire au traité méthodique) - Le rapprochement droit privé/droit public : Frémy-Ligneville, avocat à la Cour d’appel de Paris, refonde et augmente son Code des architectes et entrepreneurs de constructions (1837) dans son Traité de la législation des bâtiments et constructions. Doctrine et jurisprudence civiles et administratives (1848). 3 éditions (véritable ouvrage de droit nourris des sources classiques du droit)

  10. - L. Perrin, jurisconsulte, Code des constructions et de la contigüité ou législations complète des bâtiments et constructions, des servitudes et du voisinage, mise à la portée de tous le monde, et en rapport avec la loi du 25 mai 1838, sur la compétence des juges de paix, Bordeaux, 1840. Sa deuxième, en réalité sa 5e édition est due à M. Ambroise-Rendu, avocat à la cour de cassation et au Conseil d’Etat, avec l’aide de Jean Sirey, avocat à la cour impériale de Paris sous un titre nouveau : Dictionnaire des constructions et de la contigüité : législation complète des bâtiments, des constructions, des propriétés non bâties, des servitudes, du voisinage, etc. mise en rapport avec la doctrine et la jurisprudence administrative et judiciaire (1868). 13 éditions jusqu’en 1949. 5 nouveautés : - forme d’un dictionnaire; - fonds complet droit public et droit privé; - traite du bâtie et du non bâti; - bâtimentconstructionpropriété; - illustrations dans un Code Atlas publié en 1893.

  11. b/- Du recueil de sources juridiques aux essais critiques et synthétiques (1850-1950) - Le rôle des groupements professionnels : Société centrale des architectes, Manuels des lois du bâtiment, 1863, 2 vol. illustrés (2e éd., 1880, 3 vol., 3e éd., 1901, 5 vol. in-4°). C’est un compendium de textes juridiques avec de multiples entrées. Emile Desplanques (La Chambre syndicale des entrepreneurs), Manuel des entrepreneurs, (recueils d’ordonnances et règlements de police et d’arrêtés de la Préfecture), 2 vol., 1875-1885 . Onésime Masselin, entrepreneur des travaux publics, constructeur du Trocadéro, devient de 1866 à 1927 le chantre de la littérature juridique du bâtiment en publiant une quantité impressionnante d’ouvrages sur le droit, tout en devenant le conseiller juridique de la profession, donnant gratuitement des consultations, proposant ses services comme expert devant les tribunaux. Son œuvre offre un double intérêt: d’être souvent illustré et d’apporter des réponses pratiques aux questions que se posent en situation les constructeurs (utilisation de la jurisprudence et de la doctrine trouvées dans les revues et journaux professionnelles, Le Bâtiment, La semaine des constructeurs). Il fait œuvre de juriste.

  12. b/- La confirmation du rôle central de la propriété Henri Ravon, architecte, rédacteur de la Semaine des constructeurs et G. Collet-Corbinière, avocat, Dictionnaire juridique et pratique de la propriété bâtie. Code du bâtiment. Lois-usages-coutumes-jurisprudence du bâtiment et du voisinage (4 vol. in 8°), 1885-1891 (3 éditions jusqu’en 1915). - usage de la pratique souvent sacrifiée - résout l’accès difficile aux solutions pratiques (par le biais de la réduction en art, organisation, précision et brièveté des réponses). 4/- L’autonomie du droit de la construction à partir des années 50. - Période d’entre-deux guerre propice : première loi régissant le montage d’une opération immobilière, 28 juin 1938 : auparavant choix entre la méthode de Grenoble (construction en indivision, puis transformation en copropriété mais à l’unanimité) ou celle de Paris (futurs habitants associés d’une société de construction, avec unanimité requise en cas d’augmentation des engagements et augmentation de la fortune des associés alors que les sociétés étaient à but non lucratif) - Création de l’ordre des architectes en 1940 - Conjoncture de la reconstruction - La volonté d’un professeur de droit lié au syndicat professionnel

  13. - la propriété peut servir des finalités sociales (Duguit et la théorie de la propriété comme fonction sociale qui consiste à subordonner l’exercice du droit de propriété à son utilité sociale, laquelle peut justifier certaines restrictions au droit « absolu » de propriété). - Saleilles dès 1901 propose l’expression de contrat d’adhésion afin de protéger les contractants forcés. 3 étapes : a/- Liet-Veaux et le CNAM : la renaissance d’un savoir Au début des années 1960, trois cours - « Constructions civiles » (E. Trélat, J. Pillet, A. et J. Mesnager), « Histoire de la construction » (J.-B. Ache) et « Arts appliqués aux métiers » (L. et M. Magne, G. Janneau et Prouvé) - forment un ensemble relativement complémentaire, principalement axé sur la construction contemporaine ; le « Département construction » est doté également d’un Centre de recherche en Histoire moderne de la construction (1954) qui comprend une bibliothèque spécialisée. A cet ensemble s’ajoute en 1963, cinq ans après l’arrivée de Jean Prouvé au Conservatoire, la chaire de « Droit immobilier appliqué à la construction et à l’habitation » qui est rattachée au département des sciences de l’aménagement et de la mise en valeur. Elle est attribuée à Georges Liet-Veaux, professeur agrégé de droit public. Ce dernier rédige un manuel de droit de la construction (11 éditions jusqu’en 1994) et crée un « Institut d’études économiques et juridiques ». Il sera à l’origine de l’introduction de la discipline à l’université dans les années 1970, de la création au Ministère de la Justice d’un Bureau immobilier et de la création d’une 3e chambre spécialisée en construction à la Cour de Cassation).

  14. b/- Constitution d’un corpus règlementaire - accélération de la réglementation en 1958renforçant les techniques de protection dans le domaine du bâtiment (protection des grands équilibres urbains et ruraux ; protection du cadre de vie individuel ; protection des contractants à l’encontre des constructeurs quant à la solidité et qu’en à l’achèvement). Le législateur a mis en place plusieurs contrats spéciaux au régime impératif complet mais lourd. Le secteur protégé voit se développer de véritable contrats d’adhésion (avec une autonomie de la volonté réduite et une absence de choix ; vente d’immeuble à construire en 1967, promotion immobilière en 1972, société de construction en 1971). Même le secteur libre est encadré (retenues de garantie en 1971, relations de sous-traitance en 1975 et surtout la responsabilité des constructeurs en 1978). - Elargissement des techniques d’intervention de l’Etat face à ces espaces nouveaux à deux niveaux : intervention incitativesà l’égard des particuliers par des régimes fiscaux de faveur (sociétés de construction, avantages Malraux pour les secteurs sauvegardés, avantages fiscaux pour le locatif), aides financières (moitié du CUH), mais incitations juridiques (statut juridique des sociétés de vente, 1971; de la location accession, 1984; création des AFU, 1967). Interventions coercitive à l’égard des collectivités (augmentation des taxes ou redevances, compétence de la densité constructive au-delà d’un seuil aux communes – PLD, régulation du marché foncier – ZUP, ZAP, ZIF), allégées en 1980, de nouveau accrues en 1990. Aujourd’hui, crise du logement social et construction écologique.

  15. c/- L’ouverture européenne : Bien que les autorités européennes n’aient pas de compétence expressément reconnues en matière de construction ni d’urbanisme, le droit européen exerce une influence croissante dans ce domaine en particulier dans le cadre du droit de l’environnement (protection contre les risques industriels majeurs et sauvegarde des espèces menacées). En ce qui concerne strictement le droit de la construction, il convient de souligner : - La liberté de circulation des marchandises (1988) - La liberté d’établissement et de prestations de services (sauf l‘assurance construction, l’’aide au logement) (1987-1988) - Les règles de concurrence, spécialement dans le cadre des marchés publics en faveur d’une plus grande transparence et une meilleure information (1989, 2004). - La responsabilité du fait des produits dangereux (1985) - les contrats de jouissance à temps partagé (1994) - Les clauses abusives (1995) - l’utilisation du temps partiel de droits immobiliers (1998) Principe de subsidiarité : en droit de la Communauté européenne, règle directive en vertu de laquelle la Communauté n’agit – en dehors des domaines de sa compétence exclusive – que si, et dans la mesure où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent être réalisés de manière satisfaisante par les Etats membres, et peuvent donc être mieux réalisés au niveau communautaire.

  16. Sect. 3 : Les sources du droit de la construction - Les sources venues du sommet - Les sources venues de la base - La doctrine 1/- Les sources venues du sommet a/- La révélation ou les grands principes le principe de la double limite applicable lors de la fixation du prix d’un contrat de louage d’ouvrage entre celui fixé initialement par les parties et l’appréciation postérieure de la chose livrée (Civ. 1re, 15 juin 1973) ; celui de la fixité des servitudes malgré l’aggravation du fond servant (Civ, 3e, 7 novembre 1990) ou celui selon lequel « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage » (corollaire du droit de propriété) b/- La loi (sens multiples) - La législation publique : 3 points *La délimitation du champ de la loi d’avec celui du règlement (art. 34 vs art. 37), mais quid des décrets autonomes vs les décrets d’application

  17. Hiérarchie des normes internes et son contrôle

  18. * Quid des circulaires ministérielles souvent porteuses de règlements inavoués, dénommées « règlementaires » (vs circulaires internes) pour lesquelles le CE accorde le contrôle de légalité. Mais quid des recommandations, communiqués, avis, opinions, comme des réponses ministérielles, les avis du CE, ceux des autorités indépendantes, des services ministérielles, comme la DAPA, la MIQCP, la DIV ?

  19. * Toute les normes et règles contenues dans le Code de la construction et de l’habitation Consulter : http://www.legifrance.gouv.fr/ Ne pas oublier de consulter les normes européennes : http://eur-lex.europa.eu/fr/index.htm - La quasi-législation privée en cas de retrait volontaire (laisser négocier des accords par des personnes privées comme les conventions collectives) ou non de la puissance publique (vide législatif) * les règlements des acteurs économiques (Chambre de commerce, syndicats patronaux, entreprises de construction, bâtiment et travaux publics) * les règlements des organisations professionnelles (l’ordre des architectes, code déontologie; OPQTEC, office professionnel de qualification de techniciens et d’économistes de la construction,1996 ; Fédération nationale des travaux publics, code de bonne conduite, 1995). * Les réflexions des dispensateurs de conseils techniques (CSTB) ou juridiques (notaires, avocats).

  20. c/- La jurisprudence (sens multiples) Sens large (sociologie) : tout jugement, fût-il rendu par une juridiction des plus modestes fait parti de l’univers juridique. Mais le jugement mérite surtout son nom de source lorsqu’il s’en dégage une norme susceptible d’application au-delà de l’espèce jugée, autrement dit – et pour simplifier – quand il fait jurisprudence. En pratique, il y a donc lieu de distinguer entre le contentieux brut (largement ignoré, car il échappe en majeure partie à la publication) et la jurisprudence (publiée et commentée dans les revues juridiques dites spécialisée, Dalloz. Jurisclasseur périodique JCP, Revue trimestrielles de droit civil RTDC, AJDA, AJDI, Revue immobilière, etc.) La France adopte une position médiane entre les sociétés coutumières et le système du Common Law, Le juge français est pris entre deux feux : - la sanction du déni de justice (art. 4 C. civ. : « Le juge qui refuse de juger, sous prétexte de l’insuffisance, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice. ») - l’interdiction pour le juge de réglementer (art. 5 C. civ. : « Il est défendu aux juges de prononcer par voie de disposition générale et règlementaire sur les causes qui leur sont soumises. »)

  21. La jurisprudence développe 3 fonctions dans son autorité créatrice de droit : interprétation, suppléance et adaptation - La fonction d’interprétation : en dehors des cas où la loi est claire et précise, le juge définit les composantes de la règle qu’il édicte par le biais de la méthode de la qualification des faits. Mais il doit rester subordonné à la loi. - la fonction de suppléance : conflit entre art. 4 et 5. Même dans ce cas le juge ne serait qu’un interprète, d’autant que le principe de l’autorité de la chose jugée limite la décision du juge à la seule demande faite et aux seules parties au procès. Cependant en cas de vide, il lui arrivera de créer le droit (enrichissement sans cause, contrat d’assurance). Art. 1351 C. civ. : « L’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité ». - la fonction d’adaptation (caractère extrêmement sommaire ou dépassé de la loi. Le juge peut aller e dehors du droit, voire contre les textes (responsabilité du fait des choses, responsabilité du fait d’autrui). Quatre éléments qui accentuent le rôle créateur de la jurisprudence: - le principe du double degré de juridiction - le rôle unique de la cour de cassation, juge de la forme (donc du droit et non du fond) comme du CE - les deux ordres juridictionnels+ celui européen - en pratique, le droit jurisprudentiel est d’assez bonne tenu et dure longtemps

  22. 2/- Les sources venues de la base Le législateur a souvent tendance à reprendre à son compte les stipulations des contrats conclus entre particuliers sauf à en interdire certains comme contraire à l’ordre public. De même que la coutume (part de la coutume de Paris dans le Code civil). a/- L’acte juridique (negotium) : les contrats et marchés Il s’agit des actes spontanés des opérateurs (différents de la quasi-législation privée vue plus haut), acte d’édiction qui revêt des formes variées : les contrats. Certains ont considéré les contrats comme des faits juridiques (Carbonnier), à tort. Ph. Jestaz : « Le contrat est sans doute une petite loi, mais il a sur la loi proprement dite cette supériorité d’exprimer concrètement le droit en action », le droit vivant. Pour lui, les actes juridiques sont la chair du droit. Il existe un va-et-vient entre le contrat et les autres sources. le développement d’un contrat amène le législateur à le réglementer, mais cette réglementation déclenche de nouvelles pratiques, qui seront validées ou non par le jurisprudence. Exemple : Un acte juridique a inspiré le législateur, avec la médiation de la doctrine. La pratique des promoteurs immobiliers a inventé la vente d’immeuble à construire et a suscité la loi du 3 janvier 1967 qui avait été préparée par un notaire savant Me Thibierge. Ce contrat est aujourd’hui intégrée au CCH.

  23. b/- La coutume (exemple : les règles de l’art) Elle se différencie des normes prévues par le contrat, car elle s’impose à tous. Elle serait née à la conjonction de deux éléments : l’adéquation aux besoins du groupe et à la pression sociale 5 caractères de la coutume : - Elle est informulée (sinon elle perd sa nature) - Elle est spontanée (pas d’obéissance particulière) - Elle est continue (formation progressive) - Elle est utile (bon sens) - Elle est souple (modifiable, donc incertaine et fragile) 3/- La doctrine : source inclassable. Il s’agit des travaux des savants (professeurs, chercheurs, etc.) - Elle se situe entre le haut et le bas - Elle est indépendante et de proximité - Elle est faible et forte

  24. Sect. 4 : Les enjeux du droit de la construction - d’ordre économique : le secteur du bâtiment est une préoccupation sociale constante pour tout gouvernement. Le droit a toujours soutenu ce secteur. http://www.metiers-btp.fr/reperes/chiffres-du-btp/Pages/production-dans-BTP.aspx - d’ordre technique : le droit a toujours contribué à améliore les éléments techniques du bâti, de l’habitation et du logement, son confort, sa sécurité et son environnement. La technique figure en bonne place dans le CCH (normes de construction, de chauffage, d’acoustique, l’accessibilité, le voisinage). Et puis les normes sont émises surtout par le CSTB. - d’ordre juridique : recherche permanente de la sécurité juridique des transactions à l’égard des plus faibles face aux promoteurs et constructeurs. (art. L. 111-12 à 111-39 CCH : responsabilité –assurance; L. 210-1 à 281-1 : contrats d’adhésion pour construire).

  25. Annonce de plan Première partie : le temps préparatoire ou la constitution d’un terrain à bâtir Seconde partie : Le temps opérationnel du chantier ou les acteurs et les modalités techniques et juridiques de la construction Troisième partie : Le temps post-opératoire ou les garanties de la construction

  26. Première Partie : Préparer la construction Examinons les règles de droit qui s’appliquent au sol-support des constructions et qui modifient le droit commun de la propriété foncière ou s’y surajoutent. Art. 552 C. civ. : «  La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. – Le propriétaire peut faire au-dessus toutes les plantations et constructions qu’il juge à propos, sauf les exceptions établies au titre Des servitudes ou services fonciers. – Il peut faire au-dessous toutes les constructions et fouilles qu’il jugera à propos, et tirer de ces fouilles tous les produits qu’elles peuvent fournir, sauf les modifications résultant des lois et règlements relatifs aux mines, et des lois et règlements de police. » Ainsi, en principe, le propriétaire est seul décideur de ce qu’il veut faire de son terrain, de ce qu’il veut ou pas y construire. Terrain à bâtir : deux définitions - une définition subjective et extensive : le terrain à bâtir est celui sur lequel on se propose de construire, serait-il nu ; - une définition objective et restrictive : le terrain à bâtir est un terrain équipé (muni d'une voie de desserte et de réseaux divers) et constructible d'après les documents d'urbanisme.

  27. Définition à retenir : « le terrain à bâtir est celui sur lequel on a l’intention de construire et qui est à la fois constructible et équipé ».

  28. Annonce du plan de la première partie Titre I : Disposer d’un terrain à bâtir Titre II : Adapter le terrain Titre III : Affecter le terrain à la construction

  29. Titre I : Disposer d’un terrain à bâtir Deux moyens simples en apparence : - le contrat de vente immobilière : Un contrat de droit commun par lequel l’une des parties, le vendeur, transmet la propriété d’une chose et s’engage à livrer celle-ci, à un autre, l’acheteur ou acquéreur, qui s’oblige à lui en payer le prix (C. civ. 1582), mais avec cette particularité - depuis la loi SRU - que si l'acquéreur exprime son intention de construire un immeuble à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel, le vendeur doit fournir un descriptif du terrain (limites, dimensions, surface) et indiquer si ce descriptif résulte d'un bornage, et ce, à peine de nullité demandée par l'acquéreur dans le mois de l'acte authentique (art. L. 111-5-3 C. U.). - le contrat de louage de chose : Un contrat par lequel une des parties appelée bailleur s’oblige, moyennant un loyer, à faire jouir l’autre partie appelée locataire d’une chose immobilière ou mobilière pendant un certain temps (art. 1709 c. civ.). A distinguer du contrat de louage de service (contrat, plus souvent nommé aujourd’hui contrat de travail, par lequel une personne appelée salarié met son travail à la disposition d’une autre nommé employeur, à laquelle elle est subordonnée, moyennant une rémunération appelée salaire, art. 1780 c. civ.) et du contrat de louage d’ouvrage (contrat, plus souvent nommé aujourd’hui contrat d’entreprise ou entreprise, en vertu duquel une personne, nommé locateur d’ouvrage ou entrepreneur, s’engage à réaliser un ouvrage déterminée pour une autre personne appelée maître de l’ouvrage qui lui en paie le prix, mais à l’égard de laquelle la première n’est pas en état de subordination juridique, art. 1710 c. civ.).

  30. En réalité, deux difficultés subsistent : - parce que les terrains sur lesquels les constructeurs désirent bâtir se trouvent en général situés dans des zones territorialement limitées (zones urbaines ou périurbaines, dites aussi « secteurs stratégiques ») à l'intérieur desquelles s'installe entre eux une âpre concurrence ; • parce que fréquemment les propriétaires de ces terrains, conscients de leur rareté et spéculantà la hausse de leur valeur, préfèrent, au lieu de les affecter immédiatement à la construction, soit les conserver soit ne les céder qu'après qu'une hausse substantielle se sera produite. Il convient d’inciter, voire de contraindre le propriétaire à construire ou à faire construire. Ce qui rejoint la fonction sociale du droit de propriété, mise au jour à la fin du XIXe siècle : droit individuel certes, mais tenant compte de l’intérêt général. Ce n’est pourtant qu’à partir de 1955 que l’idée de contraindre ou au moins d’inciter le propriétaire de terrains à bâtir, impérieusement à transférer l’usage ou la propriété de son terrain au constructeur. En effet, jusqu’à cette date, et sauf pour des opérations de très grande envergure, les constructeurs n’avaient pas de problème pour trouver des terrains en raison de la conjoncture économique (destructions de la guerre, peu de besoins, la politique d’aide financière de l’Etat à ses débuts). En 1958, le marché est tombé en complet déséquilibre entre l’offre et la demande. La hausse normale au début est devenue spéculative (spéculation foncière).

  31. . 1960 : coût du terrain = 42 % du prix total de l’opération constructive 1970 : coût du terrain = 50 % ……………..idem………………………. 2006 : coût du terrain = 50/150, soit 35%

  32. Chapitre 1 : L’acquisition de la propriété du terrain 3 moyens mis en œuvre : • une technique fiscale • une technique juridique directe • une technique juridique indirecte Sect. 1 : Les incitations fiscales Une bonne solution au problème foncier pourrait tout simplement consister dans une incitation à la vente des terrains à bâtir par le biais d’une taxation de la propriété foncière et l'institution d'une sorte d'impôt de dissuasion : Si l'on taxe les terrains à bâtir laissés inutilisés assez lourdement, leurs propriétaires pourraient être découragés de les conserver « en portefeuille » ou de ne pas construire eux-mêmes et, en tout cas, être incités à les mettre en vente. Trois types de problèmes se posent alors : - taxation du terrain à bâtir ou de la plus-value ? - taxation périodique ou occasionnelle ? - taxation surajoutée ou refonte ? Aides à la décision : expériences étrangères et françaises peu concluantes. Alors que pendant longtemps le patrimoine foncier a été le principal fournisseur de ressources fiscales, ce n’est plus le cas aujourd’hui, sauf pour les collectivités locales.

  33. La taxation intervient à deux moments : à la vente du terrain ou du fait de la possession. A/- La taxation des plus-values : l’impôt au titre de la vente Avant 2004 : exonération qu’au bout de 22 années de détention et on distinguait les plus-values à long ou court terme qui étaient imposées plus ou moins dans le cadre des impôts sur le revenu. Après 2004 : (système plus incitatif) exonération au bout de la 15e année de détention. 5 années sans abattement, puis abattement de 10% par an, au bout de la 6ème année de détention. La plus-value n’est plus ajoutée au titre de l’impôt sur le revenu. Aujourd’hui, la plus-value est soumise à un taux fixe de 16 (+ 11% de contributions sociales) qui est un prélèvement à la source, plus sûr pour l’Etat. Il existe deux types d’abattement pour augmenter la valeur d’entrée du bien dans le patrimoine : - soit ajouter au prix d’entrée dans le patrimoine tous les frais d’acquisitionet droits qui sont venus s’ajouter, sous la réserve que ces frais doivent avoir été payés par le propriétaire qui revend. - soit augmenter le prix d’achat, inclure lecoût des travaux d’amélioration sur le bien (cela ne concerne pas les simples travaux de réparation ou d’entretien), soit pour leur montant réel, soit si on détient le bien depuis plus de 5 ans et si on ne peut apporter la justification des dépenses correspondant aux travaux pour un forfait égal à 15% du prix d’achat (il faut alors prouver la réalité des travaux, à défaut de pouvoir prouver leur coût). Tous les coûts des travaux ne peuvent pas être déduits, seuls les travaux assimilés à de la rénovation ou à de la construction (gros travaux). Il existe des cas d’exonération de plus-value, en cas de revente de résidence principale mais peu utile car le terrain à bâtir est rarement la résidence principale.

  34. B/- Les impôts au titre de la possession du bien 1/- La taxe foncière ? - Est-ce que la taxe foncière est un impôt incitatif pour les propriétaires de biens à bâtir pour vendre leur bien immobilier ? Il faudrait alors que la taxe foncière taxe de façon plus lourde les propriétaires de terrains à bâtir qui ne construiraient pas rapidement sur ces terrains. Pour la taxe foncière, ce n’est pas le résultat auquel on parvient aujourd’hui, car il n’y a pas de véritable politique d’ensemble à son propos. Le produit de la taxe foncière se répartit entre les différentes collectivités locales, qui peuvent appliquer des taux d’imposition différents selon leur propre politique. Il peut y avoir des variations importantes d’une collectivité locale à l’autre, et aucune politique d’ensemble ne se dégage au niveau national. - Même si les taux d’imposition sont différents, traite-t-on au moins de façon différente d’un côté les terrains construits et de l’autres les terrains à bâtir ? Le centre des impôts fonciers distingue les terrains bâtis des terrains non bâtis. En les distinguant, on pourrait essayer de mettre en place un système incitatif de vente des terrains à bâtir. Mais dans la pratique, les terrains non bâtis qui sont assimilés à des terrains à bâtir (contrairement au terrain inconstructible) doivent remplir deux conditions : * Une condition objective : les règles d’urbanisme permettent la constructibilité du terrain * Une condition subjective : le propriétaire du terrain doit avoir l’intention de construire sur ce terrain. - Dans la quasi-totalité des cas, le terrain à bâtir est traité comme un terrain non susceptible d’être bâti. Les impôts locaux ne sont donc pas incitatifs.

  35. 2/- L’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) • En remplacement de l’IGF de 1982, c’est un impôt payé par les personnes détenant un patrimoine net supérieur à 770 000 euros (seuil au 1er janvier 2008). Cet impôt redistributif est calculé sur le patrimoine, à un taux d'environ 1%, allant de 0,55 % à 1,80 %. • En 2007, près de 528.000 contribuables français ont réglé l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), pour des recettes en forte hausse (+19,9%) s’établissant à 4,42 milliards d'euros (contre 3,85 milliards initialement prévu). Cet impôt français n'a pas cours dans les TOM. • Particularité de l'ISF : c'est un impôt déclaratif et auto-liquidé. Il appartient aux personnes concernées de faire elles-mêmes une estimation détaillée de la valeur de leurs biens au 1er janvier, de calculer le montant de l'impôt et d'envoyer leur déclaration, accompagnée du chèque, à la Direction générale des impôts, avant le 15 juin. Le fisc peut contrôler la déclaration et éventuellement effectuer un redressement pendant trois ans. • Si cet impôt est le plus incitatif pour vendre son terrain, son taux ne l’est pas. Il ne l’est que si la vente d’un terrain fait passer le propriétaire sous le seuil d’imposition. La fiscalité n’est globalement pas incitative et entretient des effets pervers spéculatifs.

  36. Sect. 2 : L’acquisition de la propriété du terrain par le constructeur La raison principale des réticences des propriétaires de vendre leur terrain réside dans le fait de ne pas savoir comment réinvestir l’argent de la transaction (perte de valeur en cas d’inflation, lieu de placement délicat) Aussi pour vaincre ces réticences et sachant que les propriétaires des terrains pourraient être intéressés par de la « pierre » en contrepartie de leurs terrains, les constructeurs leur ont-ils, dans un premier temps, proposé de les apporter à une société qui leur attribuerait des locaux après les avoir faits construire, puis, dans un deuxième temps, de les leur céder directement contre la promesse d'édifier pour eux des logements ou autres locaux. A/- Apport du terrain à une société La société doit avoir pour objet de construire des immeubles en vue de leur attribution aux associés en totalité ou par fractions. Si cette condition est remplie, le constructeur offrira au propriétaire du terrain de lui attribuer des parts de la société en rémunération de l'apport de celui-ci à cette dernière ; ces parts donneront à l'apporteur droit à la jouissance de locaux déterminés après leur édification et vocation à leur propriété à la dissolution de la société ou lors de son retrait anticipé. (Anciennement loi du 28 juin 1938 et aujourd’hui dans les dispositions du titre II ou du titre III de la loi n° 71-579 du 16 juillet 1971 (art. L. 212-1 et L. 213-1 et s. CCH).

  37. Les avantages sont évidents : - simplicité du procédé, - insertion de celui-ci dans un cadre juridique éprouvé, - taxation fiscale de l'opération au régime des apports (en principe moins imposés que les ventes), - possibilité d'intéresser plusieurs propriétaires de terrains contigus ou voisins. Mais les inconvénients ne le sont pas moins. - Le procédé suppose la constitution d'une société alors que le constructeur peut fort bien y répugner, ne désirant pas avoir à subir le contrôle des associés sur son activité et, spécialement du ou des apporteurs de terrains. - Chaque propriétaire foncier devient associé avec les aléas (nombreux en matière de construction) que cette qualité comporte ; notamment il peut se voir contraint de répondre aux appels de fonds lancés par la société, sauf le cas où le constructeur s'engagerait à y faire personnellement face à sa place (encore faut-il que cet engagement soit respecté) ; or si le propriétaire du terrain veut se prémunir contre sa violation, il lui faudra prendre des sûretés personnelles (cautions) ou réelles (gage, hypothèque), ce qui complique singulièrement le système et fait que finalement il n'est guère plus utilisé.

  38. B/- Cession du terrain contre des locaux à construire Ce procédé consiste à céder le terrain au constructeur moyennant la remise de locaux dans l'immeuble à construire. Autrefois beaucoup utilisé, ce système l'est moins aujourd'hui. Pourquoi ? S'il est économiquement simple (il s'agit d'un troc), il est juridiquement beaucoup plus complexe, cette complexité devenant même inextricable lorsque le constructeur a besoin, pour implanter sa construction, de plusieurs terrains appartenant à des propriétaires différents. Même lorsque cette implantation doit être faite sur un seul terrain, la situation juridique n'est pas simple. Aussi deux hypothèses doivent-elles être distinguées, selon que le propriétaire en cède la totalité ou seulement une fraction indivise (tantièmes ou millièmes). 1/- Cession de la totalité du terrain La convention s'analyse en l'échange d'une chose actuelle (le terrain) contre une chose future (les locaux à construire). C'est un échange certes très particulier, qui comporte pour le constructeur, ainsi qu'il en est chaque fois qu'une obligation porte sur une chose future, une obligation de faire, ou d'édifier, mais c'est tout de même un échange auquel, en principe, les règles posées par le Code civil (art. 1702 et s. ) sont applicables.

  39. Conséquences : - pas d’exécution forcée si l’un des contractant n’a pas la capacité de d’échanger la chose (art. 1704 C. civ : « Si l’un des copermutants a déjà reçu la chose à lui donnée en échange, et qu’il prouve ensuite que l’autre contractant n’est pas propriétaire de cette chose, il ne peut être forcé à livrer celle qu’il a promise en contre-échange, mais seulement à rendre celle qu’il a reçue. ») - pas de rescision pour lésion (art. 1406 C.civ.) annulation pour cause de disproportion de valeurs entre les biens échangés) - La loi n° 67-3 du 3 janvier 1967 sur la vente d'immeubles à construire (art. L. 261-1-1 et s. CCH) ne s'applique pas, même dans ses dispositions d'ordre public, à cette convention parce qu'elle ne comporte pas pour le propriétaire du terrain l'obligation d'effectuer des versements ou des dépôts de fonds avant l'achèvement de la construction. - Le transfert de propriété des locaux promis s'opère lorsqu'ils sont effectivement en mesure d'être livrés. - Le propriétaire du terrain ne peut exercer, en cas d'inexécution par le cocontractant de son obligation de construire, le privilège du vendeur (art. 2374 C. civ.) puisque la convention n'est pas une vente supposant un prix, mais seulement un échange. Il ne peut exercer - ce qui n'est guère pratique - que l'action résolutoire de l'article 1184 du Code civil. « …La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. »

  40. Solutions proposées par la pratique afin de protéger le propriétaire du terrain : - soit exprimer le prix du terrain dans l'acte mais le convertir immédiatement en une obligation pour le cocontractant de construire : la dation en paiement (art. 1243 C civ.) : Modalité exceptionnelle du paiement consistant à changer l’objet même du paiement, en employant pour satisfaire le créancier (pour exécuter l’obligation) une chose autre que celle qui faisait l’objet de l’obligation. Ex. payer en nature (par le transfert de la propriété d’un bien) ce qui était dû en argent. Ce serait plutôt en réalité une novation par changement d'objet, « substitution à une obligation que l’on éteint, d’une obligation que l’on crée nouvelle. - soit distinguer deux contrats, d'une part, la vente du terrain pour un certain prix, d'autre part, la vente des locaux à construire pour un prix en principe égal, la compensation s'opérant de plein droit après construction des locaux vendus. Ces solutions sont artificielles car les tribunaux peuvent rétablir la véritable qualification du contrat en un échange. Il faut plus simplement prévoir une garantie d’achèvement pour le propriétaire du terrain.

  41. 2/- Cession de tantièmes de terrain Tantièmes : fraction d’une grandeur ou quote-part de bénéfice Lorsque les locaux à construire sont compris dans un bâtiment devant être soumis au régime de la copropriété, ils sont appelés à constituer les parties privatives du ou des lots attribués au propriétaire du terrain ; ces lots comprennent en outre des tantièmes ou millièmes de parties communes et notamment du sol. Dans cette hypothèse, il est souvent convenu que le propriétaire ne cède au constructeur que les tantièmes du sol attachés aux lots autres que les siens, mais que le constructeur s'engage à construire « sur » les tantièmes réservés des locaux qui sont destinés à ce propriétaire.

  42. Nature de l’opération et effets : Sauf le cas où il aurait été convenu que le constructeur demeurera propriétaire de tout le bâtiment jusqu'à son achèvement, il n'y a pas échange ; pas davantage vente de tantièmes du sol, même si un prix a été artificiellement stipulé. Il s'agit en réalité d'un contrat innommé du type romain do ut facias. [le droit romain a inventé la catégorie des contrats innommés, c’est-à-dire qui n’avaient pas d’action en justice et qui sont de 4 types : do ut des ; dot ut facias ; facio ut des ; facio ut facias] Do ut facias : « je te transfère la propriété d'une partie du terrain afin que tu construises les locaux qui me reviendront ». De cette qualification, il résulte deux conséquences : a/- Les locaux à construire pour le compte du propriétaire du terrain lui sont acquis par voie d'accession (mode légal d’acquisition de la propriété par extension du droit du propriétaire d’une chose aux produits de cette chose, à tout ce qui s’y unit, à tout ce qui s’y incorpore : art. 546 et 712 C. civ.). art. 712 : « La propriété s’acquiert aussi par accession ou incorporation et par prescription » art. 546 : « La propriété d’une chose, soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu’elle produit, et sur ce qui s’y unir accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement. – Ce droit s’appelle droit d’accession ».

  43. b/- L'obligation de faire incombant au constructeur n'est pas celle d'un vendeur de chose future et le propriétaire du terrain ne peut pas se garantir contre son inexécution en prenant un privilège de vendeur. Cette garantie ne peut être obtenue qu'en exigeant dans la convention du constructeur qu'il fournisse une garantie du bon achèvement de l'immeuble, analogue à celle que doit fournir dans le secteur de l'habitation le vendeur d'un immeuble à construire. Toutefois, au cas où le constructeur est une société de vente, d'attribution ou coopérative régie par les chapitres I, II ou III, selon le cas, du titre l du livre II du CCH, le propriétaire bénéficie en outre, aux termes de l'article L. 222-2 (al. 4) du même code, de la garantie due par la personne avec laquelle la société a pu conclure un contrat de promotion immobilière ou, s'il y a lieu, par son représentant légal ou statutaire assumant les obligations du promoteur.

  44. Sect. 3 : L’acquisition de la propriété du terrain par la puissance publique Lorsque l'intérêt général paraît l'exiger (pourvoir aux besoins en logement de la population), la puissance publique se porte acquéreur de terrains à bâtir, même contre la volonté de leurs propriétaires, en vue soit de les céder en propriété aux constructeurs, soit de leur en concéder seulement l'usage temporaire. Il convient d’examiner tout d’abord les moyens utilisés par la puissance publique pour acquérir ces terrains à bâtir (A) pour étudier ensuite les moyens mis en œuvre pour utiliser ces terrains à des fins de construction (B) A/- Les modes d’acquisition : Deux procédés : l’expropriation et la préemption 1/- Exproprier pour construire L’expropriation est une institution fort ancienne qui remonte bien avant le Code civil. En France, elle fut longtemps marquée par la concurrence de deux grands modèles: un modèle administratif, où toute la procédure dépend de l’autorité politico-administrative et un modèle mixte, où la justice civile intervient pour le transfert de la propriété et la fixation de l’indemnité. Le premier modèle s’impose progressivement au détriment du second sous l’Ancien Régime, et se trouve consacré par la Révolution, puis par les lois de l’An VII et de 1807. En revanche, avec la loi de 1810, qui est la grande coupure, c’est le second qui triomphe, de manière définitive.

  45. art. 545 C. civ. : « Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. » Expropriation de droit commun : 2 phases classiques

  46. On peut utiliser cette procédure de droit commun pour exproprier en vue de construire en respectant les conditions de l’article susvisé. Ainsi, les collectivités peuvent exproprier pour construire en vue de satisfaire leurs propres besoins d'intérêt général ou pour permettre à des constructeurs de réaliser des travaux destinés également à satisfaire un besoin d'intérêt général. Cependant, dans ce second cas, pour faciliter le recours à l'expropriation, la loi foncière du 6 août 1953, modifiée depuis par l'ordonnance du 23 octobre 1958 et la loi du 31 décembre 1975 a créé une expropriation spéciale aux fins d'urbanisme. - Un domaine plus large: l'expropriation de terrains à bâtir en vue de les rétrocéder à des constructeurs ne peut être utilisée que pour réaliser les opérations énoncées limitativement mais extensivementau Code de l'expropriation (plusieurs ne concernent d'ailleurs pas le constructeur) (art. L. 21-1), pour des opérations considérées comme étant par nature d’utilité publique: - la construction d'ensembles immobiliers à usage d'habitation ; - la création de lotissements destinés à l'habitation ou à l'industrie ; - la résorption de l'habitat insalubre et des immeubles à l'abandon ; - la réalisation des ZAC régies par les art. L. 311-1 et R. 311-1 et s. CU; - l'aménagement progressif des zones affectées à l'habitation ou à des activités par les PLU; - la constitution de réserves foncières créées en vue de réaliser une opération d'aménagement répondant aux objets définis à l'article L.300-1 CU ; - la création, l'extension, la transformation ou la reconversion des espaces commerciaux et artisanaux dans les zones urbaines sensibles (L. n° 96-987 du 14 nov. 1996).

  47. - Un régime élargi et simplifié : Quant aux titulaires du droit d’exproprier : En plus des collectivités territoriales et leurs établissements publics, sont titulaires du droit d’exproprier : * Etablissements publics spécifiques dits établissements publics fonciers locaux, institués par une loi du 13 juillet 1991 modifiés par la loi SRU du 13 décembre 2000 mais dont l'objet est de réaliser toutes acquisitions foncières et immobilières en vue de la constitution de réserves foncières où de la réalisation d'actions ou d'opérations d'aménagement (art. 1.324-1 et s. C.U.). * Personnes privées (sociétés d'économie mixte locales régies par la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983 ou sociétés d'économie mixte à participation publique majoritaire) à la condition d'être concessionnaires d'une opération d'aménagement (art. 1.300-4, C.U.). Quant à la procédure : Dans la phase administrative,pour accélérer les acquisitions et lutter contre la spéculation foncière, et lorsqu'il s'agit d'opérations importantes, le dossier présenté lors de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique est allégé (art R. 113, II, C. E.). En outre, les cessions de gré à gré sont facilitées (v. par ex. R. 311-10 C.U.).

  48. 2/ Préempter pour construire Pour acquérir la propriété d'un terrain qu'elle destine à la construction, la puissance publique dispose aujourd'hui, en dehors de l'acquisition amiable ou de l'expropriation de ce terrain, d'un droit qui consiste, lorsqu'il est mis en vente par son propriétaire, à se substituer à l'acquéreur choisi. Toutefois, ce droit de préemption, institué à l'origine à cette fin unique, peut aujourd'hui être exercé pour des objets très divers (art. L. 210-1, C.U. renvoyant à l'article L. 300-1) et il arrive même parfois qu'il soit établi pour préserver des espaces de la construction (art. L. 142- 1 et s. C.U. sur les espaces naturel sensibles des départements) dans le souci d'assurer la protection de l'environnement. La mise de terrains à la disposition des constructeurs et, parallèlement, la lutte contre la spéculation foncière, n'en demeurent pas moins les objectifs primordiaux de son institution. La préemption n'a cependant pas un caractère général, du point de vue territorial. Parce qu'il porte atteinte à la liberté de disposer du propriétaire et parce qu'il n'est pas utile en tout point du territoire, le droit de préemption ne peut être exercé que dans des secteurs déterminés de celui-ci.

  49. Ces secteurs ont varié avec le temps. Initialement (L. 26 juillet 1962), le droit de préemption a été institué dans les zones à urbaniser par priorité (ZUP), depuis lors disparues, et dans les zones d'aménagement différé (ZAD). Puis une loi du 31 décembre 1975 l'a établi dans d'autres zones, dites d'intervention foncière (ZIF). Mais à leur tour ces dernières ont été supprimées par une loi du 18 juillet 1985. Aujourd’hui, il existe deux types de droit de préemption. - Toutefois, cette loi de 1985 a créé en remplacement un nouveau droit, dit droit de préemption urbain (DPU), dont le champ d'application a été également circonscrit à certaines zones et dont le dispositif a été modifié par une loi du 23 décembre 1986 puis par la loi SRU du 13 décembre 2000 (art. L. 211-1 et s. C.U. ) et par la loi du 2 juillet 2003 qui a prévu qu'il pouvait être institué sur un ou plusieurs périmètres définis par une carte communale. La loi du 13 juillet 2006 a complété ce droit de préemption par un droit de priorité au profit des communes en cas de vente d'un immeuble appartenant à l'État ou à un établissement public (L. 240-1, C.U.). - La loi SRU a, en outre, maintenu le droit de préemption dans les ZAD (DPZAD) qui ont vu leur champ d'application étendu par une loi du 13 juillet 1991, mais qui sont aujourd'hui en voie de disparition (art. L. 212-1 et s.).Elle s'est aussi proposée d'unifier le régime de ces deux droitsde préemption sans y parvenir entièrement.

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